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12 avril 2013 5 12 /04 /avril /2013 15:47

LE MONDE | 12.04.2013

Par Laetitia Clavreul

 
Une délégation d'internes et de chefs de clinique est reçue le 15 janier 1990 par le ministre de la santé Claude Evin (à droite) et un de ses collaborateurs de cabinet Jérôme Cahuzac (à gauche), à Paris.

Quel médecin est donc Jérôme Cahuzac ? Depuis les années 1990, un spécialiste des implants capillaires aux tarifs libres, c'est connu. Mais sur son statut, les choses sont moins claires. Le tableau de l'ordre des médecins indique que l'ex-ministre délégué au budget est chirurgien général "en activité". En revanche, sur le site de l'assurance-maladie ameli-direct, qui recense les praticiens et précise leur secteur de conventionnement, il est... médecin généraliste, de secteur 1 (conventionné, sans dépassements d'honoraires). A l'adresse indiquée sur les deux registres, rue Clément-Marot à Paris, à deux pas des Champs-Elysées, la plaque de marbre noir a été descellée en 2012. Il y était juste indiqué "Dr Cahuzac".

Ce recensement par l'assurance-maladie a de quoi surprendre. D'une part parce que Jérôme Cahuzac est bel et bien chirurgien. D'autre part parce que le choix du "secteur 1" lui a permis une prise en charge de cotisations à la retraite complémentaire des médecins, alors qu'il n'avait pas une activité de médecin conventionné – les implants ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale. Cela fait vingt ans qu'il en est ainsi, et jusque-là, personne n'y avait vraiment prêté attention.

En 1986, Jérôme Cahuzac a obtenu un certificat d'études en chirurgie générale. Pourtant, après avoir fait son clinicat aux Hôpitaux de Paris puis être passé au cabinet de Claude Evin au ministère de la santé, il demande, en 1992, à être inscrit au tableau de l'ordre comme généraliste. Un courrier du conseil départemental de l'ordre à la caisse primaire d'assurance-maladie, datant de 1994, atteste qu'il a renoncé faire état de sa qualification de chirurgien".

LES DEUX INSTANCES SE RENVOIENT LA BALLE

Puis il change d'avis. En 1998, il est de nouveau inscrit en chirurgie au conseil de l'ordre. Il aurait aimé obtenir la spécialité "chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique", mais une commission a estimé qu'il n'a pas les acquis requis. Ce sera donc chirurgien général. Il garde pourtant le statut de médecin généraliste sur les fichiers de l'assurance-maladie. Information non transmise, absence de mise à jour ? Les deux instances se renvoient la balle sur l'origine de l'erreur. Le conseil de l'ordre de Paris devrait revenir avec Jérôme Cahuzac sur le déroulé de sa carrière, courant avril.

En 2007, quand l'assurance-maladie prépare son site Ameli-direct.fr, elle informe chaque médecin de ce qui sera indiqué sur sa fiche, pour vérification. Jérôme Cahuzac répond alors qu'il est chirurgien, et non pas généraliste. La caisse lui indique qu'il doit le justifier. Elle ne recevra aucun document, ni de lui, ni de l'Ordre. Les choses en restent là. Tant pis pour l'information des patients qui consultent le site.

Pourquoi avoir décidé de s'inscrire comme généraliste ? Au début des années 1990, il prévient par courrier la caisse primaire qu'il souhaite pouvoir faire des remplacements, puis être "omnipraticien, médecin à exercice particulier". Sollicité pour des éclaircissements, son avocat, Me Jean Veil, ne nous a pas répondu.

Son choix d'un secteur de conventionnement pose tout autant question. Il n'y a rien d'illégal à ce qu'il soit déclaré en secteur 1, les médecins qui y sont inscrits peuvent pratiquer des tarifs libres uniquement sur des actes non remboursés. Mais de 1992 à 2012, le Dr Cahuzac n'a pas pratiqué en secteur 1, puisque chaque année seuls quelques actes ont été adressés au remboursement.

RETRAITE COMPLÉMENTAIRE

Le médecin en a néanmoins tiré, sciemment ou non, un avantage : en secteur 1, les deux tiers des cotisations de la retraite complémentaire des médecins conventionnés, dont les rendements sont en outre plus intéressants, sont pris en charge par l'assurance-maladie. Résultat, la Sécurité sociale a payé depuis vingt ans pour sa retraite complémentaire – le forfait mis en place pour les médecins à l'activité réduite s'élevait à 2 900 euros pour 2012. Et selon un calcul du Parisien, le praticien touchera, pendant sa retraite, au moins 15 000 euros de plus par an que s'il avait choisi de ne plus être conventionné (secteur 3).

Un tel cas n'est pas courant, mais pas unique non plus. Ironie de l'histoire, depuis qu'elle s'est aperçue de la situation, l'assurance-maladie a trouvé, à Paris, une cinquantaine de médecins sans vraiment d'activité, mais dont elle prend en charge une bonne partie des cotisations. Elle réfléchit aux suites à donner.

Un changement ne serait pas forcément apprécié des médecins. "Vue sa pratique médicale, Jérôme Cahuzac n'avait rien à faire en secteur 1, mais ce n'est pas pour ça qu'il faut changer le système de solidarité conventionnelle que constitue le forfait, utile à certains", estime Michel Chassang, président du premier syndicat de libéraux, la CSMF, citant lui des cas de médecins malades ou en invalidité.

La fiche ameli-direct du Dr Cahuzac devrait, elle au moins, être modifiée.

Laetitia Clavreul

L'ordre des médecins entendra M. Cahuzac courant avril

Le conseil de l'ordre des médecins de Paris souhaite entendre Jérôme Cahuzac courant avril sur d'éventuels manquements au code de déontologie, qui dispose notamment que tout médecin doit s'abstenir de tout acte de nature à déconsidérer la profession. Il le lui a signifié, dans une lettre expédiée le 6 avril.

L'ordre souhaite particulièrement obtenir des explications sur d'éventuelles rémunérations perçues de façon illégale de la part de laboratoires pharmaceutiques. Des accusations de perception de paiements en espèces non déclarés font aussi partie des interrogations.

L'ordre pourrait porter plainte pour atteinte au code de déontologie auprès de la première chambre disciplinaire, présidée par un magistrat. La sanction maximum est la radiation à vie du droit d'exercer la médecine.

L'ordre des médecins entendra M Cahuzac courant avril

Le conseil de l'ordre des médecins de Paris souhaite entendre Jérôme Cahuzac courant avril sur d'éventuels manquements au code de déontologie, qui dispose notamment que tout médecin doit s'abstenir de tout acte de nature à déconsidérer la profession. Il le lui a signifié, dans une lettre expédiée le 6 avril. L'ordre souhaite particulièrement obtenir des explications sur d'éventuelles rémunérations perçues de façon illégale de la part de laboratoires pharmaceutiques. Des accusations de perception de paiements en espèces non déclarés font aussi partie des interrogations.

L'ordre pourrait porter plainte pour atteinte au code de déontologie auprès de la première chambre disciplinaire, présidée par un magistrat. La sanction maximum est la radiation à vie du droit d'exercer la médecine.

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12 avril 2013 5 12 /04 /avril /2013 15:37

Mis à jour le Vendredi 12 Avril 2013

En France, de nombreux laboratoires et médicaments ont été mis en exergue suite à des problèmes d’utilisation et effets secondaires. Mais une étude de l’Université de Colombie-Britannique (Canada) révèle que les médecins sont très généralement mal informés sur les effets secondaires des médicaments.

Publiée dans le Journal of General Internal Medicine, cette étude affirme que la plupart des médecins généralistes ne sont pas informés lors des visites médicales des effets secondaires des médicaments.
Cette étude menée entre 2009 et 2010 via des questionnaires remplis par les médecins après chaque visite médicale est extrêmement documentée et complète.
255 médecins ont participé et ont répondu au questionnaire à la suite d’un total de 1.692 visites médicales. Le but du questionnaire, était de comprendre et d’analyser les informations transmises aux médecins par les visiteurs médicales.
En conclusion, l’enquête révèle que dans la majorité des cas, sauf en France, les visiteurs médicaux ne donnent aucune information sur les effets secondaires les plus fréquents ou les plus dangereux, et qu’ils ne précisent pas le type de malade pour qui le médicament est contre-indiqué.
Les médecins affirment que la bonne délivrance des informations de sécurité est limitée à 1,7% des visites. L’étude montre aussi que les informations sur les effets secondaires sont fréquemment données à Toulouse (61%), moins à Montréal , Vancouver (34%) ou Sacramento (39%). Il apparait aussi que les événements indésirables graves ne sont déclarés qu’à 5%. Pourtant 45% des visites médicales concernaient des médicaments dangereux.
Malgré cela, les médecins considèrent néanmoins la qualité de l'information scientifique bonne ou excellente dans 54% des cas et se déclarent « prêts à prescrire » dans 64% des cas le médicament présenté.
Barbara Mintzes, auteur principal de l’étude, révèle qu’il est extrêmement rare que les visites médicales soient contrôlées et que des sanctions soient prises pour de mauvaises informations fournies.
Elle constate donc que les risques secondaires graves ne sont mentionnés que dans 6% des visites médicales.
La France semble se détacher ! En effet, les enquêtes menées à Toulouse montrent que les médecins ont été mieux informés des effets secondaires par la visite médicale. Les chercheurs attribuent ces différences au fait que les visites médicales en France soient plus réglementées.

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12 avril 2013 5 12 /04 /avril /2013 15:35

Par LEXPRESS.fr, publié le 12/04/2013

Le rapport d'expertise judiciaire indique que ce médicament aurait dû être retiré dès les premiers cas suspects et non en 2009, lors de l'éclatement du scandale. Le Mediator a fait entre 220 et 300 décès à court terme et entre 1300 et 1800 sur le long terme. 


Le Mediator aurait du être retiré du marché entre 1998 et 2003

Selon des experts, le Mediator aurait dû être retiré entre 1998 et 2003.

afp.com/Fred Tanneau

Le scandale sanitaire aurait-il pu être limité? Le rapport d'expertise judiciaire sur le Mediator, dont les conclusions ont été présentés ce vendredi au parquet de Paris, aurait dû être suspendue entre 1998 et 2003 par Servier ou par les autorités au vue des premiers cas. Il a finalement été suspendu du marché le 30 novembre 2009, grâce à l'acharnement du Dr Irène Frachon, qui a révélé le scandale.  

Malgré cela les experts estiment les décès par valvulopathies à court terme, donc à deux ans et demi, entre 220 et 300. Ils estiment les décès à long terme entre 1300 et 1800 et les hospitalisations pour insuffisance valvaire entre 3100 et 4200. ll n'existe aucune évaluation du nombre de décès dus à des hypertensions artérielles pulmonaires (HTAP), autre grave méfait possible dû au Mediator, ajoutent-ils.  

Les propriétés anorexigènes puissantes du Mediator confirmées

Le Mediator, qui contient une molécule coupe-faim, le benfluorex, a été prescrit pendant trente ans, d'abord contre l'excès de graisses dans le sang, puis comme traitement adjuvant chez les diabétiques en surpoids. Le rapport judiciaire a confirmé les "propriétés anorexigènes puissantes" de ce médicament.  

Quant à l'information des médecins, le rapport estime parallèlement que "l'absence d'informations lisibles concernant le métabolisme du benfluorex (NDLR: la molécule du Mediator) et sa parenté avec les anorexigènes n'a pas permis aux praticiens d'exercer une surveillance adéquate des patients sur le plan cardiovasculaire et pulmonaire".

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12 avril 2013 5 12 /04 /avril /2013 15:34

Un rapport de l'Académie de médecine dresse un bilan sur les dérives concernant les bilans médicaux inutiles.


 
L'Académie de médecine remet en questions les bilans de santé inutiles

L'Académie de médecine remet en questions les bilans de santé inutiles Crédit Reuters

Trop c'est trop. L'Académie de médecine a tenu à remettre en question l'utilité des bilans de santé gratuits proposés par la Sécurité sociale. Presque 600 000 personnes sont concernées par cela tous les ans. "Or, une étude très récente, publiée par la Cochrane Library et portant sur 182 880 cas, conclut que cette pratique ne réduit pas la morbidité et la mortalité, ni globalement, ni pour les pathologies cancéreuses, ni pour les maladies cardiovasculaires", explique-t-on. Dans un rapport accablant intitulé "Améliorer la pertinence des stratégies médicales", l'instance a rendu public le 10 avril des dérives sources "d'inflation de dépenses" pour les collectivités sans "pour autant apporter de bénéfices aux patients".

Dans ce texte, elle dénonce le fait qu'il "n’y a pas de prescription faite en dehors d’un docteur en médecine ou en dentaire, ce qui souligne la responsabilité du corps médical dans les dérives". Dans le viseur de l'Académie de médecin, le fait que l'examen clinique du patient soit insuffisamment pris en compte. Pourtant, ce dernier fait partie de la stratégie de prise en charge du patient. En ce qui concerne l'Assurance maladie, elle compte désormais orienter ces bilans de santé gratuits vers des populations ciblées par l'âge et les conditions sociales. L'académie ne trouve pas non plus normal que la Sécu rembourse la répétition abusive, et potentiellement nocive, de mammographies effectuées en dehors du cadre du dépistage organisé du cancer du sein.

Ces excès pourraient s'expliquer, selon l'instance, par "le principe de précaution, le risque de judiciarisation voire le consumérisme médicale".

En savoir plus sur http://www.atlantico.fr/pepites/academie-medecine-pointe-doigt-exces-bilans-medicaux-695818.html#WMyUshY3sbVUWBZ1.99

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12 avril 2013 5 12 /04 /avril /2013 15:32
Par figaro iconAnne Jouan - le 12/04/2013
Le Procureur de Paris a rendu public ce matin le rapport des experts mandatés par les juges d'instruction. Ils devaient notamment dire quelle était la nature du médicament et de combien de morts il est responsable.

«Le rapport va nous crucifier», disait-on en off chez Servier ces jours-ci. Il se murmurait en effet que les conclusions des experts mandatés voilà près de deux ans par les juges parisiens en charge de l'instruction sur le Mediator dans le volet tromperie ne seraient pas vraiment favorables au laboratoire. Et que l'estimation du nombre de décès, estimation que Servier a toujours contestée, serait sinon identique voire supérieure. Jusqu'à présent, les études des épidémiologistes chiffraient les décès à environ 1300.

Le Procureur de la République de Paris, François Molins, réunissait ce vendredi matin au Palais de justice quelques journalistes pour leur divulguer les grandes lignes de ce rapport très attendu. Cette communication se faisait en vertu de l'article 11 du code de procédure pénale, a-t-il tenu à préciser, qui autorise un procureur à «rendre publics des éléments objectifs tirés de la procédure ne comportant aucune appréciation sur le bien-fondé des charges retenues contre les personnes mises en cause». Une façon de répondre par avance aux accusations de violation du secret de l'instruction qu'auraient pu avancer le laboratoire.

Une ordonnance du 22 juillet 2010 avait missionné trois experts indépendants liés à aucune des parties: Ivan Ricordel (professeur agrégé au Val de Grace, titulaire de la chaire de chimie et toxicologie, directeur honoraire du laboratoire de toxicologie de la police scientifique), Michel Rieu (professeur de biologie honoraire des hopitaux de Paris, conseiller de l'Agence de lutte contre le dopage), Paddy Farrington (professeur britannique de statistique). Coût de l'expertise: 110.000 euros. Et à l'arrivée un rapport de 700 pages avec 11 tomes d'annexes basées notamment sur 664 publications scientifiques et des auditions réalisées par les experts en présence des juges.

Voici les points essentiels du rapport:

- le Mediator appartient à la famille des fenfluramines apparentée aux amphétamines et «possède des propriétés anorexigènes puissantes».

- le rôle et la participation de la norfenfluramine ont été «minimisé et occulté des documents scientifiques des laboratoires Servier pendant toute la vie commerciale du Mediator alors même que cette norfenfluramine constituait la raison essentielle de l'activité principale du Mediator».

- le côté anorexigène du Mediator a été «systématiquement écarté» de la stratégie d'information du laboratoire.

- le Mediator est «aussi anorexigène» que deux autres molécules de Servier, le Ponderal et l'Isoméride.

- le Mediator est à l'origine du développement de valvulopathies et d'hypertension artérielle pulmonaire.

- au vu des premiers signalements d'effets indésirables, soit entre 1998 et 2003, la suspension de l a commercialisation de la part du laboratoire et des instances publiques «aurait du intervenir».

- enfin, point le plus attendu du rapport, le Mediator serait responsable de 220 à 300 morts à court terme, de 1300 à 1800 morts à long terme et de 3100 à 4200 hospitalisations.

Le rapport est notifié aujourd'hui aux différentes parties, la défense a deux mois pour répondre. Ce qui tombera en plein pendant l'audience de Nanterre qui se voulait être le premier procès du Mediator mais un procès par citation directe soit sans instruction.

La date de rendu du rapport est donc une nouvelle façon de torpiller un peu plus le procès de Nanterre qui doit s'ouvrir le 21 mai. À Paris, deux informations judiciaires principales sont ouvertes dans ce dossier: l'une pour «homicides et blessures involontaires» pour lequel le fondateur du laboratoire fabriquant le Mediator, Jacques Servier, a été mis en examen le 11 décembre, l'autre pour tromperie et escroquerie dans laquelle Jacques Servier a été mis en examen ainsi que ses sociétés en septembre 2011.

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10 avril 2013 3 10 /04 /avril /2013 19:44
Le Parisien

Notre journal dévoile de nouvelles liaisons dangereuses entre Cahuzac, l’ex-ministre du Budget, et certains laboratoires. Matignon a été alerté dès 1989.

Séverine Cazes et Odile Plichon | Publié le 10.04.2013

Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), le 21 janvier 2000. Photo prise à l’occasion de la journée « Villeneuve Santé », organisée par l’Institut Lilly. De gauche à droite : Michel Gonelle, maire de la ville ; le préfet de l’époque ; Dominique Gillot, secrétaire d’Etat chargé de la Santé ; Jérôme Cahuzac, député, et Alain Zabulon, alors sous-préfet et aujourd’hui conseiller de François Hollande à l’Elysée.
Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne), le 21 janvier 2000. Photo prise à l’occasion de la journée « Villeneuve Santé », organisée par l’Institut Lilly. De gauche à droite : Michel Gonelle, maire de la ville ; le préfet de l’époque ; Dominique Gillot, secrétaire d’Etat chargé de la Santé ; Jérôme Cahuzac, député, et Alain Zabulon, alors sous-préfet et aujourd’hui conseiller de François Hollande à l’Elysée. | (« Sud Ouest »/ André Dossat.)

Jérôme Cahuzac et l’industrie pharmaceutique. Un homme, deux visages. Côté face, au grand jour, il y a le conseiller technique « médicaments » au cabinet de Claude Evin (gouvernement Rocard de 1988-1991), toujours prompt à tordre le cou aux « labos » trop gourmands ou encore, des années plus tard, en 2012, le ministre du Budget garant du bon usage de nos finances publiques.

Un homme certes « cassant », voire « arrogant », mais souvent décrit comme « maîtrisant bien ses dossiers », et « intègre ». Joël Ménard, l’ancien directeur général de la Santé de 1997 à 1999, se souvient : « Au cabinet d’Evin, déjà, il avait la réputation d’être un dur, de vouloir raboter les dépenses de la Sécu. On aurait dit un homme de droite. »

Côté pile, dans l’ombre, tout devient ambivalent. A bien y regarder, les liens d’intérêt sont légion. Un exemple? A peine Cahuzac a-t-il quitté le cabinet ministériel qu’il met à profit son impressionnant carnet d’adresses pour décrocher de très confidentiels contrats de consultant auprès de l’industrie pharmaceutique.

 

Bientôt un projet de loi sur les conflits d’intérêts

Un jour, il décrypte les arcanes de l’administration française pour de grands laboratoires étrangers qui méconnaissent notre système de soins. Le lendemain, il renégocie à la hausse le prix d’un produit en déclin. Une activité florissante : créé en 1993, Cahuzac Conseil affiche dès 1994-1995 un chiffre d’affaires de plus de 300 000 €. Pour la partie déclarée, du moins…

Il y a une semaine, au lendemain des « aveux » de Jérôme Cahuzac, son avocat, Me Jean Veil, affirmait que c’était bien cette activité de conseil, plus encore que la « clinique du cheveu » montée à la même époque avec sa femme, Patricia, qui avait alimenté un compte bancaire hors de France.

Innothera, Pfizer… On connaissait une partie de ce côté obscur. Pas tout, visiblement : les trois nouvelles histoires que nous révélons illustrent les étroites relations de Jérôme Cahuzac avec les labos. Ces amitiés confinant à la collusion, ces liens d’intérêts qui auraient pu aboutir au versement de pots-de-vin — les juges en décideront — ont perduré au cours des années, malgré l’alerte donnée à Matignon dès 1989, chez Michel Rocard (lire page 3) ! Dans les années 1990, Cahuzac a ainsi discrètement poussé le veinotonique des laboratoires Boots, l’Esberiven. Plus tard, début 2000, alors député et rapporteur du budget de la Sécu, il a bénéficié d’une incroyable opération de promotion dans la ville qu’il s’apprêtait à prendre l’année suivante, Villeneuve-sur-Lot. Mécène de ce grand raout ? L’américain Lilly, huitième laboratoire mondial à l’époque. Sollicité hier sur ce sujet, Me Veil, n’a pas souhaité nous répondre.

Pressé de réagir à ce vaste scandale, François Hollande dévoilera un projet de loi sur les conflits d’intérêts le 24 avril. A l’aune de ces dernières révélations, celui-ci devrait imposer de nouvelles règles déontologiques pour les élus.

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10 avril 2013 3 10 /04 /avril /2013 19:27

Le Point.fr - Publié le 10/04/2013 à 12:29

Les médecins sont responsables de l'explosion du nombre d'examens injustifiés, une des causes de l'inflation des dépenses de santé.

Les bilans annuels ne réduisent pas la mortalité ni la morbidité générales. Les bilans annuels ne réduisent pas la mortalité ni la morbidité générales. © ROGERS/NEWSTEAM / SIPA

Par Anne Jeanblanc
 

Il est indispensable d'"améliorer la pertinence des stratégies médicales". En d'autres termes, il faut cesser de réaliser de façon abusive et sans discernement des bilans de santé, des dépistages, des examens biologiques, des échographies, d'utiliser l'imagerie "lourde", les médicaments et la chirurgie. Le rapport présenté ce matin par l'Académie de médecine ne va pas plaire à tout le monde. Ses auteurs tirent le signal d'alarme. Selon eux, ce sont "les conditions d'exercice" (le peu de temps consacré à l'examen clinique), le risque de judiciarisation et le "consumérisme médical" ("j'ai payé, j'y ai droit") qui expliquent la plupart des excès. C'est pourquoi ils prônent une meilleure formation des médecins, de l'organisation des soins et des contrôles.

Concernant l'utilité des bilans annuels de santé, proposés gratuitement par l'Assurance maladie à tous ses cotisants, l'Académie s'interroge. En France, environ 600 000 personnes s'y soumettent tous les ans. Elles subissent des analyses biologiques destinées à mesurer de nombreux paramètres dans le sang et les urines. Or, une étude très récente, publiée par la Cochrane Library et portant sur 182 880 cas, conclut que cette pratique ne réduit pas la morbidité et la mortalité, ni globalement, ni pour les pathologies cancéreuses, ni pour les maladies cardiovasculaires. C'est d'ailleurs pourquoi l'Assurance maladie préfère désormais orienter ces bilans vers des populations ciblées (notamment en fonction de leur âge et de leurs conditions sociales) ou dans des études épidémiologiques organisées.

Démultiplication des examens et prescriptions floues

Deuxième interrogation : faut-il proposer un bilan pour rassurer tout patient présentant une anomalie clinique mineure ? Le rapport cite, en particulier, "la recherche des marqueurs de pathologie cancéreuse dans un large éventail sans la moindre orientation clinique". Il s'interroge aussi sur la pratique qui consiste à effectuer systématiquement de nombreux examens chez des patients qui arrivent dans les services d'urgence. D'autre part, il rappelle les recommandations récentes de la Société française d'anesthésie et réanimation, selon lesquelles aucune analyse biologique pré-opératoire n'est utile dans la plupart des cas.

L'Académie de médecine s'insurge aussi contre les prescriptions floues dans le style "bilan thyroïdien" ou encore "bilan hépatique". "Si une telle demande arrive chez le biologiste, celui-ci doit reprendre contact avec le prescripteur, identifier un dosage-clé à partir des résultats desquels l'investigation pourra être élargie", précise le rapport.

Les pertes d'argent liées à des analyses redondantes sont aussi dénoncées dans ce document. Le problème est fréquent lorsqu'apparaît sur le marché une nouvelle méthode explorant la même pathologie qu'une technique antérieure, mais en apportant des informations supplémentaires. Très souvent, le nouvel examen est pratiqué sans que le plus ancien soit pour autant abandonné. Un des meilleurs exemples a été fourni par les dosages des marqueurs cardiaques. Lorsque les recommandations concernant le dosage de la troponine I ont été émises par les Sociétés savantes, et bien que cette analyse soit maintenant considérée comme le "gold standard" pour le diagnostic des infarctus, le dosage de la CK-MB (test antérieur) a persisté pendant de nombreuses années. Et les deux analyses ont été souvent prescrites simultanément, sans bénéfice pour le patient...

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10 avril 2013 3 10 /04 /avril /2013 19:25

Par Julie Saulnier, publié le 10/04/2013

Comment la loi encadre-t-elle les relations entre les professionnels de santé et les laboratoires pharmaceutiques? Si cet arsenal juridique avait existé à l'époque où Jérôme Cahuzac était consultant, les choses auraient-elles été différentes? 


Affaire Cahuzac: des relations avec les labos pharmaceutiques pas si encadrées

Les liaisons dangereuses présumées entre Jérôme Cahuzac et les laboratoires pharmaceutiques auraient-elles pu être évitées avec la législation en vigueur aujourd'hui?

REUTERS/Stephane Mahe

Le puissant lobby des laboratoires pharmaceutiques refait parler de lui. Son ombre plane en effet sur les sommes placées sur le compte non déclaré ouvert en Suisse par Jérôme Cahuzac. Lors de l'enquête préliminaire, un témoin a déclaré que "les sommes versées sur [le compte de Jérôme Cahuzac en Suisse] proviendraient de laboratoires pharmaceutiques". Ce mercredi, une enquête du Parisien détaille "le jeu trouble" que l'ancien ministre du Budget a pu entretenir avec cette industrie de santé. Ces liaisons dangereuses, si elles étaient avérées, auraient-elles pu être évitées avec la législation en vigueur aujourd'hui? Radiographie du cadre légal.  

Les labos en chiffres 

L'industrie pharmaceutique française réalise près de 50 milliards d'euros de chiffre d'affaires annuel. Elle emploie plus de 110 000 salariés. Quelque 150 nouveaux médicaments arrivent sur le marché chaque année. 

La loi "anti-cadeaux" de 1993

Le législateur commence à s'intéresser de près à cette question en 1993. A cette date, il décide d'encadrer les relations entre les professionnels de santé et les laboratoires pharmaceutiques avec un dispositif communément appelé "loi anti-cadeaux".  

Depuis, on retrouve ces mesures préventives consignées dans l'article L. 4113-6 du Code de la santé publique: "Est interdit le fait, pour les membres des professions médicales (...) de recevoir des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d'une façon directe ou indirecte, procurés par des entreprises assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale."  

Deux exceptions néanmoins: cette loi n'empêche pas la signature de contrats dans le domaine de la recherche ou dans le cadre de colloques, si la rémunération est cohérente par rapport à la prestation rendue.  

La loi sur le droit des malades

Une décennie plus tard, la loi du 4 mars 2002, relative au droit des malades, étend et renforce la transparence dans les relations entre les labos et les professionnels de la santé.  

Les industries pharmaceutiques proposant des avantages proscrits sont par exemple passibles de sanctions, au même titre que les professionnels qui jouissent de ces largesses.  

La loi sur la transparence

Le chantier le plus récent date de l'année 2011. A cette période, le scandale du Mediator, cet antidiabétique utilisé comme coupe-faim qui aurait provoqué de graves problèmes cardiaques, provoque un coup de pied dans la fourmilière et débouche, en décembre, sur une réforme du contrôle du médicament.  

L'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afassp), dont la passivité face aux laboratoires Servier, qui commercialise le Mediator, est vivement critiquée, est remplacée par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Grande nouveauté: les industriels ne siègent plus à l'Agence, histoire d'éviter les conflits d'intérêts.  

Pour redonner confiance en les médicaments, le législateur prévoit également de rendre publics tous les contrats ou avantages entre les labos et les professionnels de santé, étudiants en médecine ou associations.  

Cas pratique: l'affaire Cahuzac

Ce dernier point aurait permis, s'il avait existé à l'époque des activités de consultant de Jérôme Cahuzac (dès 1993), d'assurer un contrôle supplémentaire. Une trace de ces liens entretenus par l'ancien ministre et les labos existerait.  

Problème: la réforme de 2011 n'est, dans les faits, toujours pas appliquée. "Le projet de décret sur la transparence a été transmis au Conseil d'Etat", a promis la ministre de la Santé Marisol Touraine. Et d'ajouter: il instaurera la "transparence totale".  

La ministre de la Santé souhaite par ailleurs la création d'un site facilement accessible pour permettre à l'avenir de répertorier ces relations. "Il ne s'agit pas d'empêcher les liens entre l'industrie pharmaceutique, les laboratoires de recherche ou les servics hospitaliers," ni d'interdire le fiancement des recherches par l'industrie, a-t-elle nuancé, le tout c'est qu'on le sache."

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10 avril 2013 3 10 /04 /avril /2013 19:23

Les médecines alternatives ont le vent en poupe. Si on ne peut remettre en cause le sérieux et l’efficacité de la plupart d’entre elles, certains s’engouffrent dans la brèche pour proposer des médecines ésotériques qui s’apparentent à des mouvements sectaires.

Après six mois de travaux, la commission d’enquête du Sénat sur l’influence des mouvements à caractère sectaire dans le domaine de la santé a rendu son rapport ce mercredi 10 avril.

Les conclusions du rapport ne sont pas rassurantes et la commission d’enquête note une nette progression des dérives sectaires dans le domaine de la santé. Et ce n’est pas les récents scandales sanitaires comme celui de la pilule ou encore du Médiator qui vont aider à inverser la tendance…

Pour documenter au mieux leur rapport, les membres de la commission ont écumés les salons dédiés au bien-être et auditionné des professionnels de santé, experts, représentants des autorités sanitaires et victimes de charlatanisme. Ils en ont conclu que "certaines dérives thérapeutiques dues à des pratiques commerciales, proches de la charlatanerie, exploitent les peurs et les attentes de la population en matière de santé et de bien-être et peuvent insidieusement orienter leurs victimes vers des pratiques thérapeutiques souvent dénuées de fondement scientifique, compromettant ainsi leurs chances de guérison".

Parmi les disciplines mises en cause, on peut citer la fasciathérapie (une pratique ésotérique inspirée de l’ostéopathie et des enseignements de Ram Chandra, fondateur de la secte Shri Ram Chandra Mission) qui a pourtant bénéficié d’un essai clinique mené à l’Institut de Cancérologie de l’Ouest d’Angers pour démontrer son impact sur l’amélioration de la qualité de vie des femmes souffrant d’un cancer du sein.

La commission a donc émis 41 propositions pour protéger les citoyens parmi lesquelles l’interdiction d’utiliser le titre de Docteur aux médecins, dentistes et pharmaciens radiés de leur Ordre (ils pouvaient encore conserver ce titre s’il l’utilisait en dehors de toute activité médicale) ainsi qu’une évaluation plus rigoureuse des diplômes universitaires (DU) dispensés dans les universités françaises et des organismes de formation privée.

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5 avril 2013 5 05 /04 /avril /2013 20:27
Auteurs fantômes & corruption de la recherche médicale

Des auteurs-fantômes discréditent la recherche médicale
 
 
Des documents internes de Pfizer, rendus publics à la suite d'un litige, ont permis de révéler qu'entre 1998 et 2000, pas moins de 85 articles scientifiques sur la sertraline (l'antidépresseur Zoloft) avaient été rédigés à l'initiative directe de Pfizer, soutiennent les auteurs.
 
Les grandes firmes pharmaceutiques ont mis au point de nouvelles formes de «recherche» sous le regard complaisant des universités. On voit apparaître depuis plus d'une dizaine d'années des «auteurs-fantômes». Cette pratique soulève des interrogations sur l'éthique des chercheurs qui acceptent de signer des articles qu'ils n'ont pas écrits - dans un monde académique en guerre avec le plagiat. Ces critiques échouent cependant à mettre en lumière la dynamique d'ensemble de ces méthodes utilisées par l'industrie, qui permet d'assujettir la science médicale aux considérations commerciales.
 
On sait que les grandes firmes pharmaceutiques consacrent deux fois plus d'argent à la promotion de leurs produits qu'à la recherche et développement. Ce n'est toutefois là que la pointe de l'iceberg: de plus en plus les activités de recherche et développement dans le domaine médical sont organisées à la manière de campagnes de promotion pour accroître les ventes. En effet, la majeure partie du budget de recherche externe des firmes pharmaceutiques sert aujourd'hui à financer des contrats attribués à des organisations de recherche privées dont le mandat est de produire les données qui serviront de base à un nombre important d'articles scientifiques. Les articles sont rédigés par des agences de communication privées (les auteurs-fantômes), et signés par des chercheurs complaisants afin de permettre leur publication.
 
Les firmes élaborent en fait des plans de publication et de communication pour faire dominer un discours «scientifique» favorable à l'accroissement des ventes. Ce discours, très sélectif sur les données qu'on accepte de rendre publiques, devient le support premier pour organiser les campagnes des représentants pharmaceutiques qui iront visiter chaque bureau de médecin pour mousser le nouveau produit.
 
Des documents internes de Pfizer, rendus publics à la suite d'un litige, ont permis de révéler qu'entre 1998 et 2000, pas moins de 85 articles scientifiques sur la sertraline (l'antidépresseur Zoloft) avaient été rédigés à l'initiative directe de Pfizer. Durant cette période, l'ensemble de la littérature scientifique comptait seulement 211 articles sur cette molécule. Pfizer avait ainsi produit une masse critique d'articles favorables au médicament, ce qui lui a permis de noyer les études critiques. Des documents internes d'autres pharmaceutiques démontrent qu'il en a été de même pour le Vioxx de Merck, le Paxil et l'Avandia de GlaxoSmithKline, le Seroquel d'Astra-Zeneca et les substitutifs hormonaux de Wyeth.
 
Afin de promouvoir le tristement célèbre Vioxx, Merck a mis sur pied une campagne au cours de laquelle des auteurs-fantômes ont rédigé quelque 96 articles scientifiques, dont les principaux omettaient de mentionner que certains patients sont décédés durant les essais cliniques. Un recours collectif intenté en Australie contre le fabricant du Vioxx a permis de découvrir que l'éditeur scientifique Elsevier avait créé pour Merck une fausse revue médicale, l'Australian Journal of Joint and Bone Medicine.
 
Un autre exemple de ce type de pratique est le programme de rédaction d'articles par des auteurs-fantômes mis en place par GlaxoSmithKline afin de faire la promotion de son antidépresseur Paxil. Selon des documents internes rendus public en 2009, ce programme s'appelait «Case Study Publication for Peer-Review» (Publication d'études de cas pour évaluation par les pairs) ou CASPPER, référence ludique au «gentil fantôme».
 
C'est donc une nouvelle norme dans l'industrie: la mise sur le marché de la plupart des médicaments présentant un important potentiel de vente est accompagnée de la publication de 50, 60 ou même 100 articles scientifiques rédigés par des auteurs-fantômes. Toute firme qui refuserait de se prêter au jeu pour des raisons d'éthique risquerait de perdre des parts de marché. Dans le secteur pharmaceutique, les bénéfices sont fonctions de la capacité des firmes à influencer les connaissances médicales et à étendre les frontières de la niche de marché pour leurs produits.
 
Mais pourquoi des universitaires acceptent-ils de signer des articles scientifiques qu'ils n'ont pas écrits et qui s'appuient sur des recherches qu'ils n'ont pas réalisées? Parce qu'ils obtiennent une reconnaissance de leur université et de leurs collègues pour le nombre et l'influence de leurs publications. Et à ce titre, les firmes pharmaceutiques et leurs agents de communication savent mieux que quiconque comment obtenir la publication d'articles dans des revues prestigieuses et comment mousser encore davantage l'importance de ces articles en faisant en sorte que leurs multiples représentants commerciaux les fassent circuler et vantent leurs mérites.
 
Les chercheurs qui acceptent de servir d'auteurs à des études et analyses (souvent scientifiquement valables) favorables à l'industrie peuvent ainsi s'attendre à ce que ces articles accroissent leur prestige et leur influence, et même le financement dont ils bénéficient.
 
Mais que se passe-t-il lorsque, à l'inverse, un chercheur produit des études et des analyses (aussi scientifiquement valables) démontrant que des produits sont dangereux ou inefficaces, comme certains l'ont fait à propos du Vioxx avant qu'éclate le scandale lié à ce médicament? À la lecture de courriels internes de Merck dévoilés lors des audiences du recours collectif intenté contre la firme, on a découvert que cette dernière avait dressé une liste de chercheurs « délinquants » qu'il fallait « discréditer » ou «neutraliser»; «retrouvez-les et détruisez-les où qu'ils soient» [traduction], pouvait-on lire dans l'un de ces courriels. Huit chercheurs de Stanford ont dit avoir reçu des menaces de la part de Merck après avoir publié des résultats défavorables.
 
Dans le cas de l'Avandia, un rapport du Sénat américain déplorait que la firme GlaxoSmithKline, lorsque confrontée à des études indépendantes défavorables, avait cherché à discréditer les résultats et à intimider les chercheurs indépendants.
 
Les universités au service de la complaisance
 
Il en va de même pour les intérêts des universités qui cherchent à multiplier les partenariats avec les firmes: un chercheur complaisant a plus de chance d'obtenir du financement externe. Pour une université, sanctionner ce type de comportement pourrait donc être mal perçu par ses partenaires industriels.
 
Dans le cas du Paxil, l'étude 329 avait «sélectionné» les résultats pour dissimuler des effets adverses importants, parfois mortels, ainsi que l'absence de bénéfice supérieur à un placebo. Les résultats ont fait l'objet de publications rédigées par des auteurs fantômes et signées par des chercheurs complaisants. C'est ce type d'études biaisée qui a permis au Paxil de se glisser parmi les trois meilleurs vendeurs aux pays. Les universités des chercheurs en cause ont refusé jusqu'à ce jour de sanctionner cette complaisance éthique, que certains considèrent criminelle.
 
Tant et aussi longtemps que les firmes pharmaceutiques détiendront les cordons de la bourse dans le domaine de la recherche médicale, les connaissances médicales continueront à être produites de manière sélective au service de la commercialisation des médicaments plutôt qu'à la promotion de la santé. De la même façon, tant et aussi longtemps que les universités plieront l'échine devant les grandes pharmaceutiques pour obtenir de nouveaux partenariats avec elles, la porte demeurera grande ouverte à la corruption institutionnelle de la recherche médicale.
 
Auteurs
 
Dr Marc-André Gagnon, professeur-adjoint, School of Public Policy and Administration, Université Carleton.
 
Sergio Sismondo, professeur de philosophie et de sociologie, Université Queen's.
 
Source : Lapresse.ca (Le Soleil)

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